Aussi loin que remontent mes souvenirs…
Cécile R.
MC 75.
La tortue - NHA TRANG (vers 2-3 ans)
La bête me fascinait, en particulier sa tête : sa gorge en accordéon palpitait.
Avec un petit bout de bois, je lui titillais le bas du cou pour voir rentrer sa tête toute entière dans la carapace. De la maison, j’entendais ma mère me crier : "Arrête, sinon tu vas la tuer !" Pourtant, j’allais la voir tous les jours dans le jardin et, malgré moi… recommençais à l’embêter !
… J’ai eu beaucoup de chagrin à sa mort.
Les gaufrettes à la vanille
Souvent, en fin de classe, notre maîtresse en maternelle sortait un paquet de gaufrettes et en distribuait deux par enfant. L’emballage à l'époque était tout simplement du papier kraft marron.
C’était mes gâteaux préférés, légères et croustillantes. Pour faire durer le plaisir, il m’arrivait de les ouvrir en deux et de lécher toute la crème vanille avant de les croquer religieusement. Seulement, mon estomac ne les appréciait guère. Arrivée chez moi, j’allais tout naturellement me pencher au-dessus du muret de la terrasse pour regarder comment les filaments de mon goûter allaient atterrir sur les jolies fleurs en contrebas…
L'accident - NHA TRANG (vers 2-3 ans)
Sur la terrasse de notre maison familiale, je jouais, pieds nus. Une voix annonçait qu'on allait sortir. Grand remue-ménage chez mes trois sœurs et frère : il fallait nous chausser (Maman n'arrêtait pas de nous dire de remettre nos tongs). Moi, je ne retrouvais pas mes "yép" (sandales japonaises). Dans la panique d'être abandonnée, je glissais mes petits pieds de bébé dans une grande paire qui traînait et me dépêchais à rejoindre les autres en dévalant l'escalier du perron... Ce fut la chute ! Ma bouche heurta l'arête d'une marche. Je sentis une vive douleur à la lèvre inférieure. Me relevant, je pus lire dans l'expression terrifiée des autres la gravité de la chose…
Tout devenait flou après : je me sentis soulevée et portée (probablement par ma mère). A l'hôpital, maintenue sur des genoux par des bras qui m'immobilisaient, je hurlais de tout mon corps tandis qu'une infirmière me recousait à vif.
Par la suite, le surnom peu flatteur de "sức môi" (lèvre fendue) m'a poursuivie toute ma jeunesse. Mon grand frère Léon en abusait à toutes les sauces, et quelquefois, quand ma mère m’appelait de la sorte, je pouvais m'attendre à un reproche qui allait suivre.
Toujours au sujet des tongs… NHA TRANG (vers 2-3 ans)
Il faut croire que toutes les mamans du Vietnam passent leur temps à répéter à leurs rejetons de mettre leurs "yép". Notre mère rajoutait : "A force de marcher pieds nus, tu finiras par les avoir en pattes de canard en éventail". La menace n'était vraiment pas terrifiante (ma sœur cadette, Noëlle, au même âge, rétorquait qu'elle trouvait les pattes du canard très jolies!). En général à chaque rappel à l'ordre, on les enfilait (après un certain temps de recherche) pour les perdre aussitôt!
Donc, un jour dans le jardin, sans mes tongs, je trébuchai sur un caillou. Alertée par mes pleurs, ma mère est venue me récupérer. Installée sur une table et encore secouée par les derniers sanglots, je regardais ma mère examiner la plaie : l'ongle du gros orteil gauche est soulevé par le milieu. Après désinfection, elle m'appliqua la "lotion bleue familiale", autrement dit la teinture d'iode.
Pourtant, mes "yép" sont incapables de rester collés à mes pieds et chaque jour, il y a toujours sur ma route un vilain caillou pour me faire un "croche-patte". Même scénario durant plusieurs jours. La plaie a évidemment eu du mal à se cicatriser. L'ongle n'a pas apprécié et je dirais même qu'il a une sale gueule aujourd’hui !
Cécile.