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Souvenirs de classe

Cécile R.

MC 75.

La voix de baryton

(5e Technique 1969-1970)


On faisait notre rentrée chez les grands avec un autre système d'enseignement : un prof différent pour chaque matière...


Quand Jean-Claude répondait aux questions de Mme Messager, toute la classe se mit à glousser, surtout nos jeunes camarades à la moustache naissante et à la voix en pleine mutation : ce n'est sûrement pas la première fois que sa voix grave surprenait plus d'un.


Personne ne prêtait attention à son discours exprimé pourtant dans un français impeccable, pleine d'assurance et "sans accent". Pour le défendre, notre prof de français déclarait : "Ben quoi ! je trouve qu'il a une très belle voix d'homme". Le compliment ne pouvait être mieux venu pour faire taire les moqueries de ses camarades !



Le bonheur des loulous

(4e Technique 1970-1971)


Qu'elle est mignonne notre nouvelle prof de sténo, si jolie dans sa robe mini et ses sabots compensés bien en vogue en ces années 70, mettant en valeur ses jambes interminables. Il dégage d'elle une candeur avec ses joues pleines et roses malgré un chignon de circonstance pour marquer ses fonctions.


Elle avait tout pour plaire, cette "Boopy" face à nos jeunes loups à la langue pendante.

A peine la cloche retentie que la petite bande se mettait en rang pour aller occuper les tables face à la sienne sur l'estrade. Le sourire béat, ils étaient en première loge et ne loupaient aucune miette des jeux de jambes de la jeune femme durant son cours...


De mémoire de profs, on n'a vu d'élèves aussi attentifs en classe !



La déception des minettes

(4e Technique 1970-1971)


Le seul sujet qui alimentait les conversations des filles et qui les mettaient toutes d'accord tournait autour du prof de compta : "Qu'il est beau, qu'il est gentil, on dirait Alain Delon !" On le savait célibataire mais on se demandait s'il avait une petite amie. Il va sans dire qu'aucune de nous ne ratait ses cours...


Mais un jour une fille, la mine catastrophée, venait nous annoncer la terrible nouvelle. Et les filles, nous étions ef-fon-drées ! : "Notre prof de compta va se marier et savez-vous avec qui ? Même pas avec une jolie jeunette mais une femme de dix ans son aînée... Quel dommage !"

Malgré tout, la vie continue, et les cours de compta aussi...



Révolution 1970

(4e Technique 1970-1971)


Le règlement interne du lycée était strict : sont interdits, entre autres, le port de tongs ou de savates pour tous, de jupes courtes ou les pantalons pour les filles.


On a eu vent que certains professeurs renvoyaient de leurs cours les nanas avec des tenues trop courtes à leur goût. Mais jusque-là, aucune ne s'est hasardée à venir en pantalon.


En ce début d'année 1970, il faisait un froid de canard : pour un mois de février, la température affichait 17° contre un 32° habituel. Avec une veste ou même un pull, les filles se les caillaient quand- même. On ne sait plus qui a donné le départ mais quelques unes se sont arrivées en classes en pantalon. En raison du temps, la direction n'a pas émis d'objection. Les filles étaient trop contentes de porter enfin leur jean "pattes d'éph" réservé jusque-là aux sorties. Le "pantalon", symbole de l'égalité des sexes nous seyaient plus à nous autres, les asiatiques, que les robes : nous n'avons pas toutes les jambes droites d'européennes à faire valoir ! L'autorisation restait tacite même après la vague de froid...


La mode était aux habits et accessoires détournés de l'armée. Le symbole "Peace and Love" côtoyait les écussons de régiments viets et de G.I's sur les pantalons de marines et vestes kaki retaillés sur mesure. Les garçons laissaient pousser les cheveux. La direction fermait les yeux, il fallait bien vivre avec son temps...


Mais notre prof de maths semait encore la terreur en cours et obligeait, filles comme garçons, à avoir les cheveux attachés. Il a même fait une queue sur le haut du crâne d'un gars juste pour lui faire honte !


Pas étonnant qu'un jour, il retrouve sa "Deudeche" avec les 4 pneus crevés !...



Le "professeur Tournesol"

(Première et Terminale G1 1974-1975)


Quand on croisait notre prof de français dans les couloirs du lycée, il marchait toujours la tête levée, les lunettes sur le nez bien haut comme pour les empêcher de tomber, sa serviette serrée sous le bras et en grande conversation avec lui-même ! En cours, il faisait des discours avec emphase sans prêter attention à son auditoire qui avait du mal à le suivre...


Ce jour-là, encore une fois, Joséphine a décidé de le "faire marcher" : le sujet portait sur la prononciation du mot "papeterie" : Elle prononçait "pa-pe-te-ri" et lui, immanquablement rectifiait "pa-pé- tri". Elle s'entêtait à soutenir qu'elle avait raison. Cette comédie distrayait tout le monde et on la qualifiait de "dispute conjugale". Ce n'était pas l'avis du chef de classe qui trouvait que notre camarade perturbait trop les cours de français.



La Tontine de filles

(Terminale G1 1974-1975)


Système d'épargne ou de prêt, ce jeu national vietnamien se pratique à tous les niveaux des classes sociales et permet d'obtenir rapidement de l'argent (souvent en liquide) en cas de coup dur.


Pour nous autres de la section technique, notre tontine se faisait fatalement... en cours de philo !

Notre pauvre prof ne se doutait guère de l'enjeu qui se tramait à son insu. Ses compétences n'étaient nullement remises en question, au contraire, un Vietnamien diplômé en philo, vous pensez, méritait notre chapeau bas !


J'ai souvenance qu'il était victime d'un eczéma sévère dont les plaques rouges sur son front suscitaient notre compassion.


Tandis qu'il essayait de nous inculquer sa science, des billets pliés en quatre renfermant le taux d'intérêt concédé par chacune circulaient en catimini jusqu'à la "teneuse de jeu", responsable du tirage de la semaine. C'était le jour "J" et chacune attendait dans la bonne humeur le résultat : qui va rafler la mise cette fois- ci ?


Pour nous, tontine et philo allaient bien ensemble: qu'on suive attentivement le cours ou par bribes, cette matière reste obscure pour la plupart d'entre nous.


Aussi, nous arrangerions bien "notre sauce" le jour de l'interrogation écrite.



Option "Dessin"

(Terminale G1 1974-1795)


Rebaptisée "Art Plastique" de nos jours, cette matière facultative au bac portait bien son nom : dispensée tard le soir, elle permettait aux élèves habiles en dessin d’obtenir des points supplémentaires pouvant venir combler ceux des matières principales.


Les cours consistaient à dessiner au crayon avec comme modèles des bustes en plâtre de personnages illustres. On avait le choix : Victor Hugo, Voltaire, Galilée… ou la Vénus de Milo. On apprenait la technique de prise de proportions à l’aide d’un crayon tenu à bout de bras devant nos yeux.


Toute l’année, on crayonnait, passant d’un buste à l’autre. Le prof circulait entre les rangées d'élèves, commentait, donnait des conseils. Pour ma part, il déclarait que je pourrais choisir la Vénus au bac, mais pour certains ce n’était pas la peine car leur représentation de cette déesse androgyne ressemblait trop à un homme !

Un jour de mai, je venais au secrétariat du lycée pour un papier administratif. C’est avec stupeur que j’apprenais que l’épreuve de dessin se déroulait à côté ! Heureusement que je n’avais pas besoin de ces points complémentaires.


Cependant, cette mésaventure m’a fait faire le même cauchemar durant des années : j’arrivais toujours en retard le jour du bac !



Cécile R.


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